Philippines et ses amies ont pris leurs quartiers d’été dans la Réserve naturelle régionale de la clairière forestière de Bresolettes. Au cœur de la forêt et aux abords du sentier de découverte de la réserve, ces chèvres des fossés et brebis solognotes trouvent leur pitance et participent à l’entretien de la lande, pour le plus grand plaisir des promeneurs.
"La Réserve naturelle régionale de la clairière forestière de Bresolettes a été classée en 2010 pour sa diversité de milieux naturels abritant une flore et une faune très riches", rappelle Aurélie Tran Van Loc, chargée de mission au Parc naturel régional du Perche, co-gestionnaire de la réserve avec l’ONF (lire ci-dessous). La lande est l’un de ces milieux très intéressants mais fragiles.
En effet, dans cette ancienne parcelle de 1,5 hectare plantée jusqu'en 2005 d’épicéas, la forêt cherche à regagner du terrain. "L'ONF a réalisé des travaux de maintien du milieu ouvert dans le cadre de contrats Natura 2000 en 2010 et en 2016, mais malgré cela la dynamique végétale reste toujours importante et les arbres reviennent avec la fougère-aigle et la molinie, au détriment des espèces de lande comme la callune, la bruyère, l’ajonc..."
Or pour rajeunir un milieu et venir à bout des végétaux ligneux, rien de tel que des chèvres ! Parc et ONF ont alors fait appel aux Brouteurs du Perche, jeune entreprise d’éco-pâturage créée début 2019, pour un "pâturage-test" sur 3000m2. "Et les premiers résultats sont là", poursuit Aurélie Tran Van Loc, "Les bouleaux ont déjà été bien broutés et ne devraient pas repousser, tout comme la molinie. Seule la fougère semble pour l’instant délaissée..."
Les animaux arrivés le 2 mai vont rester jusque début septembre. "Si le pâturage est concluant, on tachera de le poursuivre dans d'autres zones de la lande, voire de la Réserve", concluent les gestionnaires. Les visiteurs de cette véritable mosaïque de milieux naturels pourront ainsi les découvrir tout l’été grâce aux panneaux de présentation installés près de leur enclos.
Le pâturage, une technique pleine d'avantages
Technique ancestrale quasiment disparue avec la raréfaction des troupeaux (essentiellement ovins et caprins), le pâturage permettait d'entretenir des milieux gagnés sur la forêt : pelouses sèches, landes, prairies humides... La nature ayant horreur du vide, beaucoup de ces milieux ont aujourd'hui disparu avec les troupeaux qui les maintenaient ouverts. Certains sont encore entretenus de façon mécanique. Le retour du pâturage possède pourtant de nombreux atouts.
Les animaux ne tassent pas le sol comme pourraient le faire de lourds engins et peuvent entretenir des zones difficiles d'accès. Ils réduisent la production de déchets liés au fauchage, que les estomacs des animaux transforment sur place en engrais naturel, favorable à l'ensemble de la chaîne alimentaire. Et comme tous les végétaux ne sont pas consommés en même temps, une partie du cycle végétal peut se continuer. Tout cela sans bruit ni émission de CO2 !
Les entreprises d'éco-pâturage comme les Brouteurs du Perche assurent en outre la conservation de races souvent locales, comme la Chèvre des fossés. Les animaux sont chaque fois choisis en adéquation avec le site et les objectifs de gestion : ovins, caprins, mais aussi chevaux. Et tout cela pour le plaisir des visiteurs, qui y trouvent également un moyen de sensibilisation à leur environnement.
Plus d'infos sur les Brouteurs du Perche sur leur page Facebook et au 06 20 87 97 84.
La plus grande réserve naturelle de Normandie
Avec ses 780 hectares, la Réserve naturelle régionale de la clairière forestière de Bresolettes est la plus grande des 6 que compte la Normandie. Elle comprend essentiellement des habitats forestiers de la forêt de Perche-Trappe, mais aussi des zones humides et un chapelet d’étangs hérités de l’ancienne activité forgeronne.
Et qui dit diversité des milieux, dit diversité des espèces. On y a dénombré pas moins de 17 espèces de mammifères protégés au niveau national, dont 14 de chauves-souris parmi lesquelles le Murin de Daubenton, l’Oreillard roux, la Pipistrelle commune ou la Noctule de Leisler.
L’avifaune compte six espèces de pics (noir, mar, cendré, épeiche, épeichette et vert), ainsi que la Bondrée apivore ou l’Engoulevent d’Europe, eux aussi protégés, au niveau européen qui justifie le classement en zone Natura 2000.
Parmi les amphibiens et reptiles, on trouve la Salamandre tachetée, les tritons crêté, palmé et alpestre ou encore la Vipère péliade.
Côté insectes, on peut mentionner le Criquet des clairières, l’Agrion de mercure et le Miroir.
Quant aux mares forestières, elles accueillent le Drosera à feuilles rondes et l’Utriculaire citrine, deux plantes carnivores !
Une petite partie du site est en propriété privée et n’est de ce fait accessible qu’à l’occasion de visites organisées. Le sentier de Grande Randonnée GR 22 permet cependant de découvrir l’essentiel de la réserve et des panneaux de découverte conçus par le Parc permettent de mieux connaître son histoire, sa faune et sa flore.