Où sont passés les têtards ? L'écrevisse, suspect numéro 1 !

               

Où sont passés les têtards ? C’est la question que se posent les naturalistes du Parc qui, après avoir observé des pontes d’amphibiens dans certains étangs du Perche, constatent l’absence de jeunes lors de leur passage suivant au même endroit. Et si les coupables étaient les écrevisses américaines, espèces exotiques invasives introduites dans les années 70 pour des raisons commerciales ? C’est dans le cadre de l’étude d’étangs menée toute cette année (suivi de l’évolution de deux sites après travaux et étude initiale d'un groupe de 5 étangs), que des prospections relatives aux amphibiens ont été réalisées par le Parc du Perche, à raison de deux passages par étang entre mars et mai.

« Dans le premier étang visité, des pontes, larves et adultes de différentes espèces ont été observées : Grenouille rousse, Grenouille agile, Salamandre tachetée, Grenouilles vertes, Triton palmé, Triton ponctué, Rainette verte, Crapaud commun… ainsi que des dytiques, larves de libellules, etc. », expliquent les techniciens du Parc. « Mais dans la plupart des autres, nous avons constaté l’absence de certaines espèces : pas de têtards de crapauds, pas ou très peu de larves de Salamandre tachetée, bien qu’elles soient présentes en nombre dans les ornières à proximité, très peu d‘insectes aquatiques… »

Pourquoi une telle différence entre ces étangs ? Une hypothèse porte sur la présence d’écrevisses exotiques envahissantes dans les étangs plus pauvres, alors qu’elles étaient absentes du premier étang où aucun problème n’a été constaté. « Là où les amphibiens étaient très peu présents, des dizaines d’écrevisses ont en effet pu être observées, de différentes tailles, appartenant à trois espèces : l’Ecrevisse de Louisiane, l'Écrevisse américaine et l’Ecrevisse de Californie aussi appelée Ecrevisse signal. »

Ce sont les 3 espèces d’écrevisses exotiques envahissantes présentes dans le Perche. « Elles posent de gros problèmes écologiques car elles ne rencontrent pas, ou pas assez, d’éléments de régulation dans leur nouvel environnement : prédateurs, parasites, concurrents, maladies… Il faut encore ajouter leur importante capacité de reproduction, le grand nombre de milieux dans lesquels elles se plaisent et leur grande résistance à des assecs de plusieurs mois ou à des températures extrêmes. »

Bref, des espèces redoutables ! Et à l’appétit monstre ! « Omnivores, elles mangent les débris, la végétation, les jeunes poissons et amphibiens, les insectes, les mollusques… réduisant fortement la biodiversité des plans d’eau et transformant certains en désert. De plus, elles transmettent à nos écrevisses européennes des maladies qui ne les affectent pas. Enfin, ces espèces fouisseuses creusent des galeries profondes, ce qui fragilise les berges et trouble l’eau. »

Héron, aigrettes, et certains poissons comme l’anguille, le brochet ou le sandre sont des prédateurs assez efficaces. Le piégeage par nasse fonctionne assez bien. Mais l’élimination complète de ces espèces parait toutefois difficile. Aussi la meilleure prévention est de ne pas en introduire. Leur introduction est d'ailleurs interdite par la loi, et pour l’Ecrevisse de Louisiane, la plus problématique, son transport vivant est également interdit.

Apprenez à les reconnaître

Ecrevisse américaine (Orconectes limosus), originaire de la côte est des Etats-Unis.
Ecrevisse de Californie, du Pacifique ou signal (Pacifastacus leniusculus), originaire de la côte ouest des Etats-Unis.
Ecrevisse de Louisiane (Procambarus clarkii), originaire du sud des Etats-Unis et du Nord du Mexique.
Ces trois espèces sont classées comme espèces susceptibles de provoquer des déséquilibres biologiques. Leur introduction est interdite et les écrevisses capturées doivent être détruites. Leur utilisation comme appât est interdite. Dans le cas de l’Ecrevisse de Louisiane, l’importation, le transport et la commercialisation vivant sont interdits.
Ecrevisse à pattes blanches ou à pieds blancs (Austopotamobius pallipes)
Longue de 13 cm, l’Ecrevisse à pattes blanches, croît lentement,  vit 12 ans en moyenne et se reproduit une fois par an à partir de sa 4e ou 5e année. Elle aime les ruisseaux aux eaux fraiches, oxygénées, non polluées, en tête de bassin. Elle est protégée en France et justifie la création de sites Natura 2000 (espèce d’intérêt communautaire). L’espèce est en régression en raison de la dégradation de la qualité de ses habitats (artificialisation des cours d’eau, pollution, etc.) et de la concurrence des écrevisses exotiques.